Thứ Sáu, Tháng 6 27, 2025

Rick Owens : une œuvre totale sublimée par un livre et une exposition monumentale

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Le Palais Galliera accueille la première grande rétrospective française consacrée à Rick Owens. En parallèle, un ouvrage exceptionnel, Temple de l’Amour, publié chez Rizzoli, explore trois décennies de création radicale, fusionnant mode, art et spiritualité.

Une esthétique entre brutalité et transcendance

Dès ses débuts, Rick Owens a cultivé une vision du vêtement qui transcende la simple fonction. Né en Californie en 1961, le designer se forme en tant que patronnier avant de lancer sa propre marque à Los Angeles en 1994. Rapidement, il s’impose par une silhouette reconnaissable entre mille : corps allongés, drapés architecturaux, cuirs vieillis et monochromes profonds. Ses créations évoquent autant les guerriers antiques que les marginaux urbains, dans un univers où la grâce naît de la rugosité. Avec son installation à Paris en 2003, sa mode gagne encore en ambition, devenant performance, manifeste, rituel. Rick Owens ne conçoit pas seulement des vêtements — il érige des temples, façonne des personnages, questionne notre rapport au corps, au pouvoir et à l’altérité.

Cette tension entre brutalité et poésie trouve aujourd’hui un écrin à sa mesure dans l’exposition Rick Owens : Subhuman Inhuman Superhuman au Palais Galliera. Pensé comme une immersion, le parcours occupe non seulement les salles du musée, mais aussi sa façade et ses jardins, dans une scénographie spectaculaire supervisée par le créateur lui-même. Plus de cent silhouettes y dialoguent avec des installations vidéo, des objets d’archives, des œuvres d’art et des références mythologiques ou mystiques, traçant les contours d’une vision du monde où le vêtement devient langage sacré.

Un livre-manifeste à la hauteur d’un univers hors norme

En miroir de l’exposition, le livre Temple de l’Amour, publié chez Rizzoli, propose la première analyse critique approfondie de l’œuvre de Rick Owens. Cosigné par Miren Arzalluz, directrice du Palais Galliera, Alexandre Samson, responsable des collections Haute Couture et Création contemporaine, et le créateur lui-même, cet ouvrage est bien plus qu’un catalogue. C’est un voyage introspectif dans les obsessions visuelles, philosophiques et politiques d’un artiste total.

Le titre lui-même — Temple de l’Amour — condense la dualité essentielle de l’œuvre : la rigueur des lignes comme architecture émotionnelle, la quête d’un amour au sens mystique du terme. Chaque page révèle des archives rares, des croquis préparatoires, des vues de défilés devenus légendaires et des dialogues entre Rick Owens et ses collaborateurs, dont sa muse et compagne Michèle Lamy. On y retrouve aussi les grandes références qui nourrissent son travail : la peinture symboliste de Gustave Moreau, l’énergie punk de Steven Parrino, la sensualité obscure de Pasolini ou Genet. C’est un récit en clair-obscur, où chaque couture trace une ligne entre le profane et le sacré.

Une rétrospective immersive pensée comme un manifeste visuel

L’exposition au Palais Galliera ne se contente pas de montrer des vêtements : elle enveloppe, submerge, convoque. Rick Owens a conçu le parcours comme une cathédrale contemporaine, entre silence et fracas. Dès l’entrée, les visiteurs sont saisis par une scénographie monumentale, où des vidéos performatives se mêlent à des installations sculpturales, tandis que les silhouettes emblématiques se dressent comme des icônes liturgiques. Les matériaux militaires recyclés, les bottes compensées démesurées, les vestes drapées en toge ou en armure — tout ici parle d’élévation par le chaos.

Chaque salle dévoile une facette du créateur : le minimaliste des débuts, le baroque des années parisiennes, le mystique des dernières collections. Loin d’une simple rétrospective chronologique, Rick Owens : Subhuman Inhuman Superhuman est une expérience sensorielle, mentale et physique. À travers cette mise en scène radicale, Rick Owens interroge les limites de la mode en tant que médium, la poussant jusqu’à devenir installation, rituel, prière.

Rick Owens, entre héritage et rupture

Figure insaisissable de la mode contemporaine, Rick Owens défie les étiquettes. S’il emprunte à l’univers du luxe ses codes de fabrication, c’est pour mieux les détourner. Ses défilés ont souvent bousculé les normes : modèles bodybuildés, castings féminins hors normes, performances chorégraphiées ou encore références à des cultes anciens. Son approche interroge autant la représentation du genre que le corps social, l’élégance que la décadence. À la fois couturier, sculpteur, metteur en scène et penseur, il ne cesse d’explorer la porosité entre disciplines.

Avec cette double consécration — exposition majeure et ouvrage d’envergure — Rick Owens s’installe dans le panthéon des créateurs qui ont redéfini ce que peut être la mode au XXIe siècle. Non comme un simple commerce de vêtements, mais comme un territoire de pensée, un outil de transformation et une quête existentielle. Dans ses drapés noirs, il y a une lumière. Et dans ce Temple de l’Amour, il y a peut-être, enfin, un refuge pour les âmes radicales.

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